3 September 2018 - Revue de presse

Passion Montagne : Mal aigu des montagnes_

Conseil santé

Mal aigu des montagnes

A cette saison, les sommets et les arrêtes de neige, de glace ou de rocher nous appellent. La saison des grands treks et de certaines expéditions himalayennes ou andines a déjà commencé. Quel que soit l’objectif, l’altitude nous titille.

 

Mais attention au MAM!

Le MAM, mal aigu des montagnes, est un syndrome de maladaptation du corps à l’altitude. Personne n’en est protégé. Il survient en général au-dessus de 3500 mètres, très rarement dès 2500 mètres.

En altitude, plusieurs facteurs importants sont la cause d’une diminution de l’O2 disponible et utilisable par le corps humain. On souffre d’hypoxie (manque d’O2).

Lors d’une exposition longue, les premières six à douze heures s’appellent la phase blanche: il ne se passe rien. Les traileurs ou les skieurs alpinistes profitent de ce phénomène, ne passant pas plus de six heures au-dessus de 3000 mètres.

La phase d’acclimatation dure sept à dix jours. Le corps met en place des modifications physiologiques pour pallier ce manque d’O2: l’hyperventilation et l’augmentation du rythme cardiaque (absorber plus d’O2 et le faire circuler plus vite). Ces phénomènes sont coûteux en énergie (surutilisation des muscles ventilatoires et cardiaque) et nécessitent une modération des efforts pendant quelques jours.

Puis, des changements hormonaux amènent l’augmentation des globules rouges, amplifiant ainsi la capacité du sang à transporter l’O2 aux tissux. Cela rend le sang plus épais aggravant aussi le risque de thrombose.

Après dix jours, si le corps a bien compensé: c’est l’acclimatement, on peut commencer à faire des efforts modérés.

Cependant, il se peut que le corps surpasse ses capacités à s’acclimater et la spirale du MAM commence avec des complications qui peuvent être rapidement mortelles: oedème pulmonaire de haute altitude (OPHA) ou cérébral (OCHA).

 


Comment reconnaître un mal aigu des montagnes?

Les symptômes inauguraux peuvent commencer six à vingt-quatre heures après l’arrivée en haute altitude et sont peu spécifiques: maux de tête, symptômes digestifs (nausées, vomissements,), fatigabilité, insomnie, vertiges, oedème facial ou des membres (marque des chaussettes, de la montre, plus fréquent chez les femmes).

 

Au-dessus de 3500 mètres, tout symptôme est considéré comme signe de mauvaise acclimatation et est à ne pas négliger ou à attribuer à une autre cause!

 

Un score peut être établi à partir des signes observés

1 point par symptôme maux de tête
nausées, perte d’appétit
insomnies
vertiges, tête dans du coton
2 points par symptôme maux de tête ne cédant pas aux antalgiques
1 g (aspirine, paracétamol)
vomissements
3 points par symptôme essoufflement au repos
fatigue anormalement importante
baisse du volume des urines

Conduite à tenir

  • Score de 1 à 3 points: MAM léger, antalgique habituel: 1 g aspirine, 1 g paracétamol (si pas de contre-indication).
  • Score de 4 à 6 points: MAM modéré: antalgique, repos et stopper la progression en altitude pour vingt-quatre à quarante-huit heures, jusqu’à résolution des symptômes.
  • Score > 6 points: MAM sévère: descente (et/ou caisson, et/ou O2) obligatoire!

 

Comment diminuer le risque de MAM

  • Faire des paliers de 400 mètres au maximum entre deux nuits consécutives. Il est possible de monter plus haut (passage d’un col) et de redescendre dormir à une altitude plus basse.
  • Si l’arrivée se fait en avion en haute altitude > 3500 mètres (Leh, Lapaz, Lhassa…), prendre trois à quatre jours de repos complet pour permettre à l’organisme de s’acclimater.
  • Ne jamais faire d’effort intense, et toujours garder de la marge.
  • Beaucoup boire (pas ou très peu d’alcool), il faut que les urines restent claires (jusqu’à trois à quatre litres/jour). L’air très sec, et souvent froid, cause une perte d’eau par la respiration qui doit être compensée.
  • Tester sa capacité à s’adapter avant de partir pour un trek de longue durée ou en pays lointain (Himalaya, Andes...). Quelques nuits en cabane au-dessus de 3000 mètres indiqueront votre capacité d’adaptation et, en cas de complication, l’évacuation est plus facile (descente moins longue, disponibilité d’un hélicoptère).
  • Etre en bonne santé générale avant de partir en expédition ou en trek ou même un week-end d’alpinisme en Europe. Le stress, la fatigue les semaines d’avant, les refroidissements ou toute autre maladie peuvent être un facteur favorisant. Prévoir quelques jours pour décompresser.
  • Savoir reconnaître les symptômes d’un MAM qui dégénère et savoir renoncer.

 

Que faut-il faire

Le meilleur remède est toujours la descente, quelques centaines de mètres peuvent suffire.

Si c’est impossible (nuit, remontée d’un col, tempête), l’utilisation d’un caisson hyperbare, d’O2 en bouteille ou de médication (selon avis médical) peut permettre de gagner un peu de temps, avant de redescendre.

Tout le monde n’est pas égal face à l’altitude. Il n’y a aucune façon de savoir avant d’y être exposé ou aux mêmes conditions (chambre hypoxie, consultation de médecine d’altitude).

Il y a des facteurs de risque: antécédent de MAM, longueur du séjour en altitude, mauvaise réponse ventilatoire au test lors d’une consultation de médecine d’altitude, hypertension pulmonaire, maladie chronique.

 

Conseils et astuces

  • Pour soulager les maux de tête, garder le buste surélevé en se couchant, pour diminuer la pression intracrânienne.
  • Boire beaucoup (éviter l’alcool).
  • Changer le curseur de la performance, garder de la marge et profiter du voyage.
  • Au-dessus de 5000 mètres, ne jamais dormir seul. L’oedème pulmonaire survient souvent à la fin de la nuit.
  • Médicaments: ne pas utiliser de somnifère pour dormir, car la plupart sont des dépresseurs respiratoires, augmentant les apnées du sommeil, et donc l’hypoxie.
  • Le Diamox (diurétique) semble aider l’acclimatation en améliorant la réponse ventilatoire. Cependant, il n’est pas un remède contre le MAM, et ne devrait pas être utilisé pour le soigner! Ne jamais l’ingérer sans avoir eu préalablement une consultation de médecine d’altitude (effet secondaire et intolérance!).

 

http://www.ifremmont.com/sosmam-detail.php

 

Dr Emilie Léonard
Chiropraticienne ASC, ASC, FICS
Diplôme de médecine de montagne UIAA/ISMM Centre médical de Vidy

Parution : Passion Montagne mars — septembre 2018