15 April 2018 - Revue de presse

Le Matin Dimanche : La radiothérapie mieux tolérée, plus précise et plus rapide_

L’EDGE® est un accélérateur linéaire de dernière génération qui traite les tumeurs avec une très haute précision.


Interview avec le PD Dr. Abderrahim Zouhair, directeur médical du Centre de radio-oncologie de la Clinique de La Source.

Dr Zouhair

 

En quoi consiste la radio-oncologie ?

Il s’agit d’une spécialité médicale largement reconnue développée depuis le début du XXème siècle. La radiothérapie est basée sur l’administration de radiations ionisantes pour détruire les cellules cancéreuses. Elle peut être utilisée seule, ou associée à d’autres traitements, comme la chirurgie, la chimiothérapie,  l’immunothérapie et l’hormonothérapie.

La radiothérapie améliore le contrôle des tumeurs et contribue ainsi à la guérison des patients. Elle est utilisée chez plus de la moitié des malades atteints d’un cancer.

Grâce aux progrès de ces dernières années, de nouvelles formes de radiothérapie nécessitant un très haut degré de précision sont devenues possibles telles que la radiochirurgie, la radiothérapie stéréotaxique crânienne et extra-crânienne (poumon, foie,..). Ces traitements permettent de délivrer des doses élevées de rayons ultra-ciblés sur la tumeur tout en diminuant de manière très significative le rayonnement sur les tissus sains avoisinants.

 

Pour quels types de cancers cette thérapie est  elle particulièrement indiquée ?

La radiothérapie est indiquée pour tous types de cancers quelle que soit leur localisation.

Il faut souligner que la prise en charge de nos patients est personnalisée. Elle tient compte non seulement de la biologie tumorale, de la localisation et de l’étendue du cancer, mais également de l’état général du patient au moment du diagnostic.

La situation de chaque patient est discutée de manière interdisciplinaire lors du « Tumor Board » avec les différents spécialistes. La radiothérapie se voit ainsi, dans la plupart des cas, combinée à d’autres traitements (chimiothérapie, immunothérapie, hormonothérapie, chirurgie). On utilise par exemple la radiothérapie après une opération du cancer du sein afin de réduire significativement le taux de récidive.

 

De manière générale, quel rôle joue la radiothérapie dans les soins apportés ?

En fonction du type de cancer, de sa localisation et de son extension, on distingue la radiothérapie à visée curative ou palliative (antalgique).

La radiothérapie « à visée curative », a pour objectif d’éradiquer le cancer, seule ou en association avec d’autres traitements. C’est le cas notamment pour les deux cancers les plus fréquents, celui de la prostate chez l’homme et celui du sein chez la femme.

La radiothérapie « à visée palliative », c’est-à-dire lorsque la maladie est à un stade disséminé, a pour but d’améliorer le confort et préserver la qualité de vie du patient. Elle permet de diminuer voire supprimer les symptômes (douleurs, saignements et infiltrations nerveuses) en ralentissant la progression de la maladie durant des mois voire même des années.

La radiothérapie est de plus en plus indiquée dans les situations intermédiaires dites « cancer oligo-métastatique », c’est-à-dire les cancers qui présentent peu de métastases. Elle permet de stopper voire éradiquer les métastases, limitant ainsi les traitements généraux (réduction des doses et/ou arrêt momentané des traitements ce qui permet au patient de récupérer). C’est le cas par exemple des cancers du poumon et/ou du foie avec un faible nombre de métastases.

 

Quels sont les principaux atouts de la Clinique de La Source en matière de radiothérapie?

Nous disposons dans notre clinique des équipements de dernière génération, associés à une équipe hautement qualifiée. L’accélérateur linéaire TrueBeam® acquis en 2011 fut le premier à être installé en Suisse romande. L’appareil Edge® est apparu en 2015 et il a été opérationnel au sein du Centre de radio-oncologie de la Clinique de La Source au début 2016. Ces prouesses technologiques permettent de délivrer des soins d’excellente qualité en respectant ainsi les recommandations internationales. Toutes les dernières avancées techniques telles que la radiochirurgie, la radiothérapie stéréotaxique cérébrale et la synchronisation de la respiration sont largement utilisées au quotidien dans notre centre. J’ai notamment vu certains hôpitaux à l’étranger qui disposent des mêmes machines que notre clinique, mais qui malheureusement ne profitent pas de toutes les options que celles-ci peuvent offrir.

TrueBeam Edge

Concrètement, comment se passe la formation ?

Lorsque le Centre de radio-oncologie de la Clinique de La Source acquiert un appareil sophistiqué tel que le Edge®, c’est la société fabricante elle-même qui établit, en collaboration avec nous, un programme de formation pour toute l’équipe soignante (médecins, physiciens médicaux, techniciens et dosimétristes).

 

Et par la suite?

Une formation continue de toute l’équipe est prodiguée, ce qui est extrêmement important. Un stage de perfectionnement est proposé en Suisse ou à l’étranger au moins une fois par année. La langue dans laquelle la personne est la plus à l’aise joue parfois un rôle dans son choix, car l’équipe est très internationale. Certains préfèrent l’Italie ou le Portugal, qui dispose d’un centre de référence pour l’équipement acquis. Éviter de tomber dans la routine est essentiel au quotidien.

 

Quelles sont les nouvelles possibilités apportées par le nouveau système EDGE® acquis par le Centre de radio-oncologie de la Clinique de La Source?

L’accélérateur linéaire EDGE a apporté des améliorations notoires aux patients grâce au principe du suivi du mouvement en temps réel, à la synchronisation des mouvements respiratoires du patient et à une surveillance accrue en cours de traitement avec interruption immédiate et automatique en cas de nécessité.

Grâce à l’enregistrement de la respiration du patient lors du scanner de planification, les rayons peuvent être délivrés par l’accélérateur linéaire EDGE en synchronisation avec le mouvement respiratoire en temps réel. Ceci permet de traiter une zone plus réduite tout en diminuant les doses sur les organes avoisinants.

Une nouvelle technique en cas d’irradiation du cancer du sein gauche a ainsi vu le jour. Avant, le coeur recevait passablement de radiations en raison de sa proximité avec le sein gauche, ce qui n’est plus le cas, ou beaucoup moins. Les rayons sont administrés sur le sein gauche au moment où la patiente respire profondément et le coeur se trouve ainsi éloigné de la zone irradiée.

L’accélérateur linéaire EDGE permet la réalisation d’une synchronisation respiratoire, ce qui représente également un grand progrès pour traiter les tumeurs localisées dans les organes bougeant lors de la respiration, comme les poumons et le foie. Sa précision est encore plus élevée que celle de l’accélérateur TrueBeam. Cela nous permet d’optimiser le traitement des très petites tumeurs.

Par cette technique, la durée totale d’un traitement est considérablement réduite, de plus de la moitié, comme c’est le cas notamment lors des traitements de petites tumeurs pulmonaires et cérébrales.

Nous traitons parfois des lésions de l’ordre du centimètre avec une marge de sécurité de l’ordre de 2 à 3 millimètres autour de la cible. Nous avons ainsi pu développer un traitement encore plus pointu que ce que nous faisions déjà.

 

Existe-t-il encore d’autres sécurités ?

Tout à fait. Avant d’entamer chaque séance de radiothérapie, nous commençons par acquérir des images de la zone atteinte grâce à un scanner intégré. Cela nous permet d’avoir des images « en temps réel » et de les comparer à celles utilisées lors de la planification du traitement. Si ces images diffèrent  nous ne démarrons pas le traitement. Elles nous permettent également de suivre l’évolution de la taille de la tumeur durant l’irradiation et de l’adapter si nécessaire au fur et à mesure du traitement.

 

Quels sont les progrès que vous avez observés en radio-oncologie ?

Ils sont énormes. Lorsque j’ai commencé au CHUV, la radiothérapie se faisait encore au cobalt. Mais c’est surtout depuis une quinzaine d’années que l’on assiste à une poussée technique dans tous les domaines.

 

Pouvez-vous nous donner quelques exemples ?

L’imagerie médicale, tout d’abord, a fait d’énormes progrès. Nous voyons de mieux en mieux les tumeurs ce qui permet de mieux les traiter. Il existe aussi désormais des logiciels qui permettent de fusionner différentes images entre elles, de diagnostiquer plus précocement et de procéder à des traitements plus ciblés. Parfois, nous gagnons juste quelques millimètres de précision, mais cela est essentiel lorsque l’on se trouve tout près de structures nobles comme le coeur.

Les nouvelles techniques d’irradiation dynamique sont également un grand progrès par rapport à celles fixes. Elles permettent d’englober toute la zone à traiter, tout en réduisant nettement les effets secondaires. Nous parvenons maintenant par exemple à protéger l’hippocampe, qui est le siège de la mémoire, alors qu’il y a quelques années encore, les traitements ciblés des tumeurs au cerveau généraient des effets négatifs à ce niveau.

L’approche interdisciplinaire s’est aussi beaucoup systématisée. À la Clinique de La Source, nous avons un « Tumor Board » hebdomadaire, c’est-à-dire un comité pluridisciplinaire qui se réunit pour échanger sur le dossier médical complet de chaque patient et lui proposer ainsi le meilleur traitement.

 

Actuellement, où en est-on en termes de taux de guérison global ?

En Suisse, comme dans les autres pays occidentaux développés, nous guérissons la moitié des cancers. De plus, il faut rappeler qu’un traitement en ambulatoire coûte le même prix dans une clinique privée que dans un hôpital public. En effet, l s tarifs sont unifiés et définis par Tarmed. Mais beaucoup de gens n’en ont pas conscience et s’imaginent qu’une clinique privée est hors de portée pour eux.

 

Comment se déroule un traitement au Centre de radio-oncologie de la Clinique de La Source?

Les traitements se font en ambulatoire à 95%. Quand ce n’est pas le cas, c’est très souvent pour épargner des trajets à un patient pour qui il est compliqué de se déplacer, davantage que pour des raisons strictement médicales.

 

Rédaction: Marie Vuilleumier, Mélanie Capitaine, Francesca Sacco
Parution : Le Guide Santé, supplément du Matin Dimanche du 15 avril 2018