30 janvier 2020 - Revue de presse

Passion Montagne : Les gelures_

Conseil santé

La gelure est une lésion localisée, causée par l’effet du froid lors d’une exposition à des températures inférieures à 0° C. Ce phénomène est favorisé par l’humidité, le vent, la haute altitude, un équipement inadapté, des vêtements trop serrés.

On observe trois étapes, dans le mécanisme des gelures: la phase primaire (refroidissement et gel), la phase secondaire (réchauffement), la phase tardive (lésions définitives).

Lors de la phase primaire, afin de protéger les organes vitaux et les maintenir à une température de 37° C lors de l’exposition au froid, on observe une fermeture des petits vaisseaux aux extrémités. Les phalanges ne seront alors plus vascularisées ni oxygénées. Si le phénomène se prolonge, ces tissus vont se nécroser. Et le processus s’étendra progressivement à la phalange suivante, puis à la main et au pied…

Simultanément, le sang déjà présent dans les extrémités, va stagner et geler, tout comme les cellules qui vont éclater et mourir, participant ainsi au phénomène de nécrose.

Le premier signe indiquant qu’une gelure se développe est une perte de sensibilité et l’absence de douleur, alors que, auparavant, nous avions froid et mal aux extrémités. Dans ce cas, il faudra rapidement commencer le traitement. 

La phase secondaire démarre donc lorsqu’on peut réchauffer les extrémités et qu’il n’y a et n’y aura plus d’exposition au froid. Lors de ce processus, les cristaux de glace formés dans les tissus, vont fondre et les vaisseaux sanguins s’ouvrir. Il se produira alors une revascularisation des extrémités qui, progressivement, vont se colorer en gris, en bleu, en violet.

Vingt-quatre à quarante-huit heures après le début du réchauffement, apparaissent des «ampoules», qui pourront être très volumineuses et remplies de sang, ce qui est un mauvais pronostic.

Lors de la présence de signes de gravité, comme les ampoules remplies de sang, il faudra instaurer un traitement spécifique le plus rapidement possible en milieu hospitalier.

La phase tardive, qui débute quarante-huit à septante-deux heures après le début du réchauffement, correspond à la phase de cicatrisation et peut se prolonger à plusieurs semaines.

On observera alors les lésions finales et les séquelles irréversibles. Ainsi, il y aura cicatrisation des tissus qui auront pu être revascularisés, alors qu’une gangrène s’instaurera dans les tissus qui n’auront pas pu l’être et devront être amputés..

Malgré un traitement bien mené et instauré rapidement, des symptômes, tels que douleur au froid, hyper- ou hyposensibilité, peuvent persister pendant des mois, voire des années. 

Les victimes de gelures graves qui ont pu éviter l’amputation pourront souffrir d’arthrose précoce, déjà après un an, pouvant s’accompagner de déformations des doigts.

La classification des gelures ne peut se faire qu’après réchauffement, et on distingue quatre grades.

Les grades 1 et 2 sont de meilleurs pronostics, ne nécessitent pas d’hospitalisation et le risque d’amputation est quasiment nul.

Les grades 3 et 4 nécessitent une hospitalisation, des soins locaux quotidiens et sont associés à un risque élevé d’amputation.

En cas de gelures, les premières mesures à prendre sur le terrain consistent à boire autant que possible (même des boissons froides, mais pas d’alcool), à réchauffer les zones gelées par massage doux (éviter frottements énergiques, avec de la neige) ou à se chauffer dans l’aisselle ou l’aine d’un accompagnateur, enlever les souliers, changer les vêtements humides.

Tant qu’on ne se trouve pas dans un lieu adapté et chaud (refuge, bivouac, camp de base…) et si on risque une nouvelle exposition au froid, il ne faut pas réchauffer les organes plus de dix minutes et on devra remettre les souliers après dix minutes au maximum.

Si la sensibilité ne revient pas, il sera urgent de pouvoir trouver un refuge ou se rendre à l’hôpital.

Dès qu’on sera en lieu adapté, il faudra alors réchauffer les extrémités en les immergeant dans l’eau à 38 à 40° C, si possible avec un peu de désinfectant (ou de gnôle) pendant trente à soixante minutes, et prendre de l’aspirine et/ou de la Nifédipine (10 mg) si disponible. Il faudra éviter tout pansement compressif.

A la suite du réchauffement, on pourra déterminer le grade des gelures. En cas de grade 3 ou 4, il faudra s’orienter vers un centre hospitalier en urgence.

Si ce n’est pas possible, par exemple lors d’expéditions en haute montagne, alors il faudra, dans la mesure du possible, prendre un antibiotique (amoxycilline + acide clavulanique), percer et ponctionner les ampoules en veillant à bien désinfecter la peau, en utilisant du matériel si possible stérile.

Quoi qu’il en soit, le meilleur traitement commence par des mesures préventives, afin de limiter le risque de gelures.

Il faudra donc veiller à bien s’hydrater (sans alcool ni caféine), à porter des vêtements adaptés, à éviter de serrer exagérément les chaussures et les vêtements, à éviter l’humidité (sous-vêtements et chaussettes de rechange), éventuellement prendre de l’aspirine déjà le matin du départ.

Dr Marcos del Cuadro
Médecine du sport SSMS
Médecine interne générale FMH
Vidy Sport – Centre médical Vidy Med
www.vidysport.ch

Parution : Passion Montagne janvier — février 2020