Cette méthode ancestrale fait son grand retour dans les maternités, permettant aux mamans d'accueillir leur nouveau-né dans le calme
Jean-Philippe, sage-femme à la Clinique de La Source, répond aux questions de BouncyMag sur l’utilisation de l’hypnose durant l’accouchement.
En quoi consiste l’hypnose?
Jean-Philippe, sage-femme à la Clinique de La Source : L’hypnose est une pratique qui modifie notre état de conscience par rapport à l’éveil. On ne dort pas mais on est dans un état très proche de celui du sommeil. Cela se manifeste par un état de détente extrême et de pleine conscience. On entend tout, on se souvient de tout et on garde le contrôle de la séance. D’ailleurs, le patient peut parler à tout moment et même arrêter la séance si besoin. Ce dernier n’est jamais manipulé. En revanche, on peut simplement influencer certains comportements qui ne sont pas forcément conscients.
L’hypnose permet ainsi d’accéder à l’inconscient qui est responsable de nos comportements addictifs, compulsifs, etc. Par diverses techniques, on influence progressivement le comportement. Une seule séance peut parfois suffire.
Comment l’hypnose est-elle utilisée dans le cadre d’un accouchement?
Au sein de la Maternité de la Clinique de La Source, je pratique, avec l’accord de la patiente, l’hypnose durant l’accouchement.
Souvent, les contractions et le travail mettent les femmes enceintes dans un état second, qui facilite l’hypnose. Il est donc très facile de détendre et d’amener la future maman dans un état de sérénité et de déconnexion entre deux contractions, malgré l’intensité du travail.
Est-ce que la pratique de l’hypnose a changé votre façon d’appréhender l’accouchement avec vos patientes?
L’hypnose a transformé ma façon de parler. Je ne parle jamais de « douleurs » ou de mots à connotation négative. Je tourne différemment les phrases pour que le cerveau n’entende pas les mots qui provoquent du stress ou de l’inquiétude. J’ai dû réapprendre à parler et ainsi inclure seulement des mots et des images positives dans mes dialogues.
L’inconscient ne retient pas la négation, mais uniquement les mots utilisés. Il faut donc lui parler de manière directe et positive. S’il entend « n’aie pas peur », il retient le mot « peur », s’il entend « cela ne va pas faire mal », il retient « mal ». En deux phrases, on induit négativement une notion de douleur et de peur à la patiente.
Est-ce qu’on utilise les mêmes procédés d’hypnose pour tout le monde?
Lors des rendez-vous avant l’accouchement, on va écouter attentivement la patiente et son langage. On va observer si sa sensibilité est plutôt olfactive, auditive, visuelle ou tactile. Ainsi, lors de l’hypnose, on utilisera les sensations et images qui correspondent au mieux à la patiente.
Je pratique une hypnose permissive, qui doit laisser au patient le choix de ce qu’il peut ressentir, en opposition avec l’hypnose directive, telle qu’utilisée par Mesmer à la télé, qui ne laisse pas le choix.
Y a-t-il des personnes chez qui l’hypnose ne fonctionne pas?
Avec l’âge, on a plus de barrières psychologiques. Il faut quelques fois plus de temps pour parvenir à un état de transe hypnotique. Par exemple pour les enfants, chez qui il y a moins de barrières, il est très facile de partir dans l’imaginaire et l’hypnose fonctionne donc très bien.
Comment peut-on savoir si l’hypnose va fonctionner?
Plus la personne est en attente, plus l’hypnose sera efficace. Parfois, on sait que l’hypnose a fonctionné avant même que cela ait lieu.
Comment aider une femme qui a eu un accouchement traumatique et qui attend ou voudrait un 2ème enfant?
Dans ce cas, on retravaille en sécurité ce premier événement traumatique en lui faisant revivre cet accouchement, non pas en tant qu’actrice mais comme spectatrice. Cette technique permet de diminuer fortement l’émotion liée à l’événement jusqu’à la rendre neutre. Le souvenir reste négatif mais l’émotion débordante engendrée n’est plus ou du moins beaucoup moins présente. Cela permet de désolidariser ce que la patiente a vécu la première fois du terme « accouchement ». Elle peut alors l’appréhender comme un nouvel événement qui n’aura pas de lien avec le premier.
Faut-il nécessairement procéder à l’oubli de l’accouchement traumatique?
Que l’accouchement soit mauvais ou bon, il y a toujours une part amnésique qui permet aux femmes de recommencer. Si certaines femmes ont besoin de se rappeler ce qu’il s’est passé, nous pouvons reprendre le dossier dans lequel chaque étape est précieusement documentée. Elle pourra ainsi remettre les événements dans l’ordre et en perspective réelle. Il s’avère qu’il n’est pas nécessaire de se rappeler de tout et il faut peut-être laisser au corps cette protection engendrée par l’amnésie.
Comment le partenaire peut-il se rendre utile?
Lors des préparations à la naissance, la personne accompagnante est conviée pour une séance. Elle peut ainsi apprendre les gestes qu’elle peut reproduire et les mots à employer au moment de l’accouchement. La présence de la personne accompagnante est très importante puisque, si elle est détendue, attentive et dédiée au moment présent, elle participe au déroulement serein de l’accouchement. La future maman peut alors rester dans sa bulle et la personne accompagnante fait l’interface avec le personnel soignant.
La sérénité de l’entourage, aussi bien le futur co-parent que le personnel soignant, est indispensable pour garantir une expérience positive pour la maman et le bébé.
Existe-t-il d’autres techniques naturelles pour se préparer à l’accouchement?
On peut notamment utiliser l’acupuncture en prénatal, pour tourner bébé, préparer le col, ou encore faire disparaître des hémorroïdes. Durant l’accouchement, cette technique permet notamment de renforcer les contractions, d’aider le bébé à se tourner et descendre dans le bassin.
On peut également utiliser le ballon forme, le chant prénatal, le yoga, la sophrologie, l’haptonomie ou l’aromathérapie, en fonction des volontés de la future maman. Toutes ces activités peuvent impliquer le ou la partenaire et elles ne peuvent qu’améliorer l’expérience de l’accouchement. On recommande aux couples d’oser, d’essayer et d’expérimenter parce que, quoi qu’il arrive, on ne peut en ressortir que du positif !